« Two Pack » ou le libéralisme totalitaire contre la démocratie

« Two Pack » ou le libéralisme totalitaire contre la démocratie

Samedi 10 décembre 2016, par Gérard Da Silva, Tribune libre

Le 1er février 2012 est publié le « Traité instituant le mécanisme européen de stabilité ». Dans ce contexte est mis en place par la Commission de Bruxelles, le 27 mai 2013, le « Two – Pack », qui « entre en vigueur le 30 mai 2013 dans tous les états membres de la zone euro »…

Le système « Two –Pack » se prévaut de l’article 136 du Traité « sur le fonctionnement de l’UE ». Trucage, car 136 ne parle que de « renforcer la coordination et la surveillance de leur discipline budgétaire » et ignore la commission de Bruxelles !

C’est un passage en force, illégitime et contestable par n’importe quel gouvernement. Avec « Two Pack », c’est le libéralisme totalitaire qui se met en place. Qu’on en juge : « Le « two-pack » impose aux États membres de la zone euro un calendrier et des règles communs en matière budgétaire. Concrètement, les obligations suivantes s’appliqueront dès le prochain cycle budgétaire :

 le 30 avril au plus tard, les États membres de la zone euro devront publier leur plan budgétaire à moyen terme (programme de stabilité), ainsi que leurs priorités d’action pour la croissance et l’emploi pour les 12 mois suivants (programme national de réforme) dans le contexte du semestre européen pour la coordination des politiques économiques ;

 le 15 octobre au plus tard, les États membres de la zone euro devront publier leur projet de budget pour l’année à venir ;

 le 31 décembre au plus tard, les États membres de la zone euro devront adopter leur budget pour l’année à venir.

Le « two-pack » introduit une nouveauté importante en ce que la Commission examinera chaque projet de budget national et formulera un avis y afférent pour le 30 novembre au plus tard. Si la Commission constate des manquements graves aux obligations découlant du pacte de stabilité et de croissance, elle demandera à l’État membre concerné de lui présenter un plan révisé. En ce qui concerne la zone euro dans son ensemble, la Commission publiera une évaluation complète des perspectives budgétaires pour l’année suivante. » Or le gouvernement Hollande – Valls s’est soumis tant au Traité qu’à « Two Pack »…Alors que la proposition 11 du candidat Hollande affirmait : « Je renégocierai le traité européen issu de l’accord du 9 décembre 2011 en privilégiant la croissance et l’emploi, et en réorientant le rôle de la Banque centrale européenne dans cette direction ». Trahison, tant il était facile de refuser, car il est précisé que ce système n’est pas « incorporé dans le droit de l’Union » (mais qu’il est censé l’être dans les cinq ans)…Les conséquences de la soumission – trahison sont dramatiques.

Pour autant, le « DOCUMENT DE TRAVAIL DES SERVICES DE LA COMMISSION Rapport 2015 pour la France », publié le 26 février 2015, énonce : « le taux de chômage, qui atteignait 10,2 % en 2014, ne devrait pas refluer de manière significative au cours des prochaines années… Les investissements ont diminué en 2014 dans un contexte où les marges bénéficiaires des entreprises demeurent fragiles, mais ils devraient augmenter au cours des prochaines années. » Ce qui revient à reconnaître, officiellement, que le prétexte invoqué par Hollande –Gattaz-Berger pour le pacte de responsabilité et le CICE, à savoir l’emploi et l’investissement, fait un flop ! Le « DOCUMENT DE TRAVAIL DES SERVICES DE LA COMMISSION Rapport 2016 pour la France », confirme le credo libéral en dépit d’un bilan économique de la casse sociale exigée reconnu négatif : « à long terme, la croissance devrait rester faible, étant donné que la croissance potentielle de la France a ralenti depuis la crise financière de 2008. » La Commission reconnaît que le vrai problème découle de la financiarisation de l’économie et de la crise de 2008.

En acceptant « Two Pack », le gouvernement Hollande- Valls-Sapin a présenté son « Programme de stabilité » 2015 : « Dans sa recommandation du 10 mars 2015, le Conseil de l’Union européenne a donné à la France jusqu’à 2017 pour corriger son déficit public excessif. La trajectoire de déficit nominal recommandée pour atteindre cet objectif est la suivante : 4,0 % en 2015 ; 3,4 % en 2016 ; 2,8 % en 2017 ». Parmi les mesures proposées, déjà la loi Travail : « le Premier Ministre vient de lancer une mission afin d’estimer les modifications du droit nécessaires pour élargir la place de l’accord collectif dans notre droit du travail, en particulier au niveau de l’entreprise. »En conclusion : « La gouvernance nationale des finances publiques est enfin pleinement intégrée dans la procédure européenne. Depuis l’entrée en vigueur du règlement dit « two-pack »... ». Tout est dit et, dans ce contexte, il n’y a pas d’alternative : c’en est fini de la démocratie.

À preuve, le Programme de stabilité du gouvernement français d’avril 2016 n’est que répétition du diktat idéologique du libéralisme : « Afin de respecter les objectifs fixés dans la loi de programmation, ce sont 3,8 milliards d’euros complémentaires qui devront être économisés en 2016. De même, le Gouvernement prévoit de mettre en œuvre dans les textes financiers de fin d’année 5 milliards d’euros de mesures complémentaires en 2017. Elles mettront à contribution l’ensemble des administrations selon leur poids dans la dépense publique. ». Le bouc émissaire demeure le budget de l’État : « Au-delà de 2017, cette politique sera maintenue et permettra de retourner à l’équilibre structurel des comptes publics dès 2019 à la faveur d’un ajustement structurel de 0,5 point de PIB en 2018 puis de 0,3 point en 2019.

En pleine cohérence avec ces objectifs, la poursuite de la baisse des prélèvements obligatoires sera rendue possible par une évolution de la dépense publique contenue au rythme de l’inflation. » Dans ce contexte on trouve la loi Travail : « Le projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs (projet de loi « travail »), présenté en Conseil des ministres le 24 mars, vise à édifier une nouvelle architecture du Code du travail… Le projet de loi confie ainsi aux partenaires sociaux, en particulier au niveau de l’entreprise, la responsabilité de la définition des règles relatives à l’organisation et au temps de travail, dans les limites définies par la loi. »

C’est sous ces fourches caudines que le gouvernement s’est engagé, dans un cadre totalitaire proclamé par le document de la Commission de Bruxelles, « The 2015 Ageing Report », qui est une série de « projections » « économiques et budgétaires destinée aux 28 membres de l’Union Européenne »…projections qui portent rien moins que sur la période 2013-2060 ! Imposture, aucun des auteurs de ces élucubrations trafiquées de statistiques n’ayant la moindre idée de la situation en 2040 ou 2060 ! Et la bulle spéculative est toujours là et ne manquera pas d’imploser.

Alors qu’au plan économique il faut un déficit public maitrisé, au sens keynésien, d’une part, et définanciariser l’économie d’autre part. Car c’est la financiarisation de l’économie (plus de séparation entre activités des banques, interdiction infondée faite aux Banques centrales d’aider directement les États, permissivité injustifiée dans les privatisations et les fusions –acquisitions…) qui est cause de la crise actuelle.

Le combat est au long court, par la grève, par le combat au plan légal contre des lois qui bafoue l’égalité constitutionnelle des citoyens devant la loi. Il est, aussi, dans un rapport de force international démocratique contre le libéralisme totalitaire.

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