Le peuple

Le peuple

Samedi 1er septembre 2018, par Gilbert Legay

A l’approche de chaque élection, beaucoup de nos responsables politiques redécouvrent une entité qu’ils avaient jusque- là un peu oubliée, le Peuple...Cette grande chose un peu encombrante qui au fil de l’Histoire, a construit la France, fait la Révolution et instauré la République, pour que chacun puisse vivre dans la liberté, l’égalité et la fraternité.

Le parcours ne fut pas sans difficulté et le Peuple se découvrit des ennemis irréductibles qui n’hésitèrent pas, pour le dévaluer, à utiliser d’autres termes : de la plèbe à la populace (voire le populo), de la masse à la multitude, rien ne lui fut épargné !.. Comme furent aussi contestées ses capacités à comprendre, à analyser, à prévoir.

Maintenant encore, sa lucidité est contestée par une certaine élite, car avec d’autres méthodes et d’autres arguments, l’accès à la connaissance est rendu plus difficile du fait de la paupérisation de l’école publique, pour les enfants du peuple, et surtout, ceux issus des milieux les moins favorisés.

Ce constat n’est pas sans rappeler, suite au vœu de Lazare Hippolyte Carnot d’instaurer l’enseignement obligatoire, gratuit, unique et laïque, la réponse que fit Adolphe Thiers : « Lire, écrire, compter, voilà ce qu’il faut apprendre, quant au reste, cela est superflu. Il faut bien se garder surtout d’aborder à l’école des doctrines sociales, qui doivent être imposées aux masses. Folie bien plus funeste encore, celle qui consisterait à rendre ce même enseignement obligatoire (…) L’enfant qui a trop suivi l’école ne veut plus tenir la charrue (…) J’irais jusqu’à dire que l’enseignement est un commencement d’aisance et que l’aisance n’est pas réservée à tous ». Si ce type de mépris est passé à la trappe, on continue à maintenir le peuple dans l’ignorance des vrais enjeux qui le concernent, derrière l’écran de fumée des discours convenus au seul service des intérêts d’une minorité… Quant au développement du sens critique et des responsabilités citoyennes, il suffit d’oublier les règles des ordonnances de 1944 sur la presse et de soumettre la télévision à la dictature de l’Audimat pour les réserver (comme l’aisance pour Adolphe Thiers) à un public choisi et bien informé qui saura décrypter les vrais enjeux.

Heureusement, le Peuple eut aussi de valeureux défenseurs d’Antoine de Caritat, marquis de Condorcet à Victor Hugo, de Jean Jaurès à Charles de Gaulle, Pierre Mendes France, qui tous ont su, parmi beaucoup d’autres, défendre, comprendre et respecter le peuple. Il suffit de s’informer sur ce que souhaitaient les femmes et les hommes « d’en bas » dans les cahiers de doléances des années 1788-89 pour constater que leurs attentes de paix, de justice et de liberté étaient très en avance sur ce que la classe au pouvoir était disposé à lui accorder ! La situation n’est guère différente aujourd’hui, quand face au peuple qui attend, les hérauts des « intérêts supérieurs » inondent le peuple de mensonges et de promesses que l’on ne tiendra pas !

Non, la mondialisation n’est pas la conséquence du développement inéluctable des techniques de communication qui rendent le monde plus petit ; le temps est toujours aussi long et l’espace toujours aussi grand pour ceux qui ont faim et attendent leur part de la richesse produite… Non, la mondialisation n’est pas le grand village mondial, mais le champ clos (globalisé !) ouvert à la circulation des capitaux et où s’ébattent les grands intérêts financiers, les multinationales et les managers de la synarchie qui veulent se partager la richesse et organiser le monde pour en faire leur jardin privé !

Non, nous ne sommes pas en Démocratie malgré l’engagement pris dans l’article 2 de notre Constitution : Gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. Ceux qui nous dirigent invoquent cette notion de Démocratie à longueur de discours, mais la trahissent à la première occasion, comme ce fut le cas après le référendum de 2005 et l’adoption du traité de Lisbonne par tous ceux qui avaient oublié le sens du mot Démocratie (« le pouvoir du peuple » pour ceux qui auraient la mémoire défaillante) !...Mais le peuple, lui, se souvient, y compris de ceux qui lâchement, se réfugient dans l’abstention quand il s’agit de respecter le verdict de la Nation.

Non, il n’y a pas de « peuple européen » !.. Il n’y a en Europe que des peuples qui aspirent à la liberté, fiers de leur histoire, de leur culture, de leur langue, disposés à vivre en Paix, prêts à coexister, à échanger, à partager, à commercer avec les peuples voisins et à conclure avec eux des accords, des synergies, des traités. Il y a quarante ans, ces peuples étaient d’accord pour une Europe des peuples que quelques petits démiurges ( baptisés créateurs de mythes par Charles de Gaulle dans Mémoires d’espoir) ont transformé progressivement en une chimérique Europe fédérale asservie à la rentabilité, à la finance et au marché libre et totalement faussé par l’absence de règles sociales et fiscales.

Avant que l’Europe supranationale ne s’écroule dans un grand fracas, il serait sage d’interroger le peuple toujours prompt à transformer l’indignation en révolte !

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