Qu'est-ce que la "gouvernance" ?

Qu’est-ce que la "gouvernance" ?

Mardi 11 juin 2019, par Christian Berthier

Un mot : Gouvernance

Les grands media en abusent : Gouvernement et Gouverner : au piquet ! Place à la « gouvernance » !

Pourtant, dans les dictionnaires, le suffixe « -ance » indique le résultat d’une action et non l’action, ni l’acteur eux même. Il en est ainsi des couples , allier/alliance, décroitre/décroissance, dépendre/dépendance, assurer/assurance, résister/résistance, croitre/croissance, obéir/obéissance, etc.

Et de constater l’abus de ce terme par les organismes internationaux tels que OCDE, Banque Mondiale, OMC, Union Européenne et les journalistes, chercheurs, politiciens qui se réclament de leurs actions ou les commentent.

Si la « gouvernance » est le résultat d’une action, alors pourquoi cacher derrière ce mot les acteurs et leurs actions ? Qui gouverne, pour faire quoi et dans quel but ?

Les conséquences de ces actions, ces actions elles mêmes, ces « gouvernances » et, osons le mot : ces « politiques » sont redoutables, incontestables et invariantes. Et ce à grande comme à plus petite échelle pour s’en tenir à notre Europe.

Citons : défaillance généralisées des débiteurs publics et privés, misère et chômage croissants, abstentions aux élections, mécontentements massifs, déficits commerciaux…autant de « non-conformités » des résultats par rapport aux objectifs déclarés : croissance, désendettement, emploi, progrès, etc.

A la longue, pourrait se créer l’impression d’une « classe politique » impuissante, courant après une évolution implacable de l’État et de la Société. Une évolution vidant de tout contenu les mandats des élus et de leurs assemblées et laissant les citoyens et les familles sans protection ni recours contre les initiatives privées et/ou de tel service ou fonctionnaire de l’État.

Force est de reconnaitre que beaucoup a été fait en ce sens depuis la constitution de 1958 du « coup d’état permanent » : élection présidentielle et referendum plébiscitaires, guerres non déclarées au Parlement, carcan triennal de budgets perdant leur caractère annuel, mise en cause de la compétence générale des assemblées locales élues, mise sous tutelle de leurs budgets et emprunts par les préfets et des cours des comptes à tous les niveaux, transformation des organes de l’état en relais obéissants des directives et organes de l’Union Européenne, recul constant de la primauté du Droit et de la Loi devant le laisser-faire concurrentiel des intérêts privés.

A la fin de sa longue et rebelle histoire, le Peuple « constitué en corps » du bas vers le haut dans la République serait condamné à n’être qu’une foule hétérogène, sans élus ni racine, désorganisée et prise dans les mailles du filet d’acier d’une « gouvernance » d’État soumise aux obligations de créanciers sans visage.

Tel n’est pas ce que nous apprennent les histoires des peuples. Constitués dans les contradictions et les luttes, poussés par des exigences vitales croissantes, les peuples ont toujours eu le dernier mot et remplacé les carcans du passé par des organisations plus aptes à assurer leur essor et leur survie.

La démocratie républicaine, l’élection d’Assemblée Constituante peut constituer le processus le plus souple pour démonter les carcans de « gouvernances » échappant à tout contrôle dans leurs appétits de domination. Mais à trop durer, l’accumulation de forces sociales antagonistes peut rendre un tel processus à son tour impossible, comme la mer finit toujours par l’emporter sur les digues.

Dès aujourd’hui, la sourde résistance du peuple s’exprime par le refus croissant, conscient ou obligé de la très grand majorité des élus locaux, des communes et des départements, de leurs associations librement consenties, des personnels de tous grades et tous statuts, refus de disparaitre, de voir leurs mandats vidés de leur sens et leurs budgets confisqués par une « gouvernance » irresponsable des « territoires ».

Ils enragent de se voir brocardés par les grands media comme partie d’un « millefeuille » couteux et inutile. Alors qu’il gèrent mieux que l’Etat, sont moins endettés et ne sont ni responsables des scandales de DEXIA et des emprunts pourris. Ces 500 000 élus municipaux, ces 4000 conseillers généraux constituent un cadre politique entièrement élu, vivant et incarnant une république qu’une « gouvernance » sans visage s’attache à dissoudre et à corrompre. Il est temps d’aller au-delà des reculs imposés depuis 2008 dans la négociation des lois territoires et dans les échéances électorales, alors même que la pression du mécontentement populaire ne s’était pas pleinement exprimée. En particulier, de quel droit les départements devraient-ils abandonner le 30 milliards que l’état leur doit au titre des transferts non compensés de ses fonctions nationales ? Faudrait-il aujourd’hui, au nom de « dettes » qui ne les concernent pas, licencier massivement ces dizaines de milliers de fonctionnaires titulaires ? Une telle « gouvernance » est inacceptable pour l’électorat.

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