Abolir la dictature constitutionnelle !

Abolir la dictature constitutionnelle !

Mercredi 19 février 2020, par Ecole critique de Strasbourg

L’article ci-dessous a été publié par l’École Critique De Strasbourg Pour L’émancipation. Nous le publions avec leur accord. Son analyse s’inscrit parfaitement dans les critiques qui fleurissent enfin vis-à-vis de nos institutions. Vous pouvez aussi le retrouver sur le site http://ecsemancipation.com .

Abolir la dictature constitutionnelle !

Une Constitution, qui a pour objet de définir le fonctionnement des institutions d’un État, doit contenir des dispositions qui permettent d’organiser des débats publics sur les questions relevant d’un projet de société. La contre-réforme des retraites et des pensions est une belle illustration du contraire, attestant de la nature anti-démocratique de l’actuelle Constitution et de la loi électorale. Le débat public est bloqué dans le pays pour une raison purement idéologique : l’interprétation que l’élite politico-médiatique donne de la signification des élections. Elle nous assène que l’élection du président de la République lui donne le droit d’appliquer le programme défendu pendant sa campagne, et ce, quelles que puissent être les protestations sociales et même les objections institutionnelles, pour argumentées qu’elles soient : il n’y a qu’à penser au diagnostic avisé des syndicats que vient conforter l’avis du Conseil d’État publié le 24 janvier 2020. Le processus politique, éphémère, s’arrêterait le soir des élections : seul importerait le résultat final et tout l’agenda politique serait fixé de manière unilatérale par l’exécutif.

C’est une singularité hexagonale : le mode de scrutin à deux tours fait qu’un parti ou un candidat qui l’emporte au second tour aurait toute légitimité pour imposer au pays son programme électoral, même s’il n’a recueilli qu’un quart des suffrages au premier tour. On affecte de s’étonner de la crise de la représentation provoquée par le décalage, désormais abyssal, entre le pays réel et sa représentation institutionnelle, illustrée par la révolte populaire des Gilets jaunes et la montée exponentielle de l’antiparlementarisme. Différents facteurs ont encore accentué la dérive autoritaire ces dernières décennies : le passage au quinquennat et l’inversion du calendrier électoral en 2002, qui placent en première ligne la figure présidentielle de l’homme providentiel ; l’obstruction du débat parlementaire par la pratique abusive de l’article 49.3 de la Constitution et des ordonnances, etc.

Il n’en a pas été toujours ainsi. Le programme commun d’union de la gauche, par exemple, avait été négocié par les partis politiques avant les campagnes électorales de 1977 et de 1981. Actuellement, un seul individu, entouré de conseillers plus ou moins secrets, peut élaborer et décider seul du programme qu’il propose aux primaires de son parti ou qu’il impose au mouvement qu’il crée de toutes pièces. À l’époque où discussions et désaccords entre courants étaient autorisés au sein d’un même parti, la protestation en 1984 d’un million de personnes peu habituées à défiler dans la rue pouvait forcer le gouvernement à renoncer à un engagement de campagne, pourtant légitime, comme la fin du financement public de l’école privée. À présent, plusieurs millions de manifestants contre la loi El Khomri (2016) ou contre la réforme des retraites, dans sa version Fillon ou Philippe (2003 vs 2019-2020), ne parviennent pas à infléchir un gouvernement et un président intransigeants qui vont jusqu’à criminaliser l’opposition du mouvement social à leur projet en organisant la répression policière et judiciaire, instrumentalisant sans vergogne les lois d’urgence ou leurs succédanés.

La suite sur https://blogs.mediapart.fr/ecole-critique-de-strasbourg-pour-l-emancipation/blog/150220/abolir-la-dictature-constitutionnelle

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