
Intervention de Michel Lamboley sur la question des retraites
Mercredi 2 avril 2025, par
Le samedi 1er mars , Michel Lamboley, responsable du réseau social laïque, a animé, à Malzeville à côté de Nancy, une réunion publique sur la question des retraites dans le marché unique .
On trouvera ci-dessous le texte de son intervention.
Les retraites dans le marché unique.
Evoquer la question des retraites ne peut s’abstraire d’un contexte historique qui lui est propre. Dans ce cadre, opposer la retraite par capitalisation et par répartition, habituel débat de la « gauche radicale », n’a aucun sens, tout comme supposer que la retraite par capitalisation va s’y substituer.
En effet rappelons le contexte. Nous sommes « dans » la construction du fédéralisme européen néolibéral dont les critères de Maastricht, qu’a adopté le peuple français, définissent les contraintes budgétaires avec « l’Europe sociale » comme garantie du marché unique. Cette mystique sociale, crédible à l’époque, est aujourd’hui, bonne pour des illuminés après la forfaiture morale et politique du Traité de Lisbonne. Les partis politiques de gouvernement ont « dissous le peuple ». Rien d’étonnant qu’aujourd’hui les deux partis qui n’y étaient pas (RN et LFI) représente un tiers (33%) du parlement, malgré le mal nommé « front républicain », parfaitement anti démocratique, d’autant qu’il soutient implicitement des partis qui ont justement trahit la république et donc le peuple en 2007.
La sécurité sociale meurt avec la fiscalité qui finance à 37% les pensionnés. Les exonérations salariales (cotisations patronales) accordées aux entreprises, sans vérification de leur efficacité, représentent 22 % du budget de l’Etat. Cette fiscalisation s’accompagne de l’effacement progressif des partenaires sociaux. Le modèle français universaliste et laïque (pas Bismarkien), construisait des garanties collectives issues du contrat de travail, il dépend aujourd’hui d’une fiscalité inégale avec 33% du budget de l’Etat, composé de taxe sur les produits (TVA…). Aussi les retraites financées par ce type d’imposition, auxquelles s’ajoute des contributions régressives (CSG..), renvoient au système anglais, compatible avec les marchés financiers comme l’avait remarqué en son temps A Croizat. C’est aussi parfaitement compatible avec les restrictions budgétaires pour rester dans le critère des 3% du traité de Maastricht.
Aussi, cette destruction s’accompagne de la restriction des droits sous la mystique de la démographie. En effet, c’est le travail qui finance les retraites. Certes des vieux multiplieront le besoin des pensions, mais l’important c’est d’éviter 6 millions de chômeurs toute catégorie confondue dont une grande partie viennent des délocalisations intra-européennes, c’est-à-dire dans le marché unique européen. Selon l’INSEE, les délocalisations, c’est plus de 550 000 emplois entre 1995 et 2017, 725 000 si l’on prolonge la tendance jusqu’en 2024. L’important c’est la productivité du travail, c’est-à-dire sa valeur ajoutée unitaire produite en France. Faire une fixette exclusive sur la démographie, c’est accepter de renoncer aux garanties collectives, pour s’inclure dans le mouvement de capitalisation des retraites.
Je n’insisterais pas sur ses dangers. Je vous demanderais d’agir en citoyen et de vous informer de l’efficacité actuelle des fonds de pension tel que la préfon. Même si les fonds obtiennent des rendements acceptables, votre pension capitalisée ne suivra pas forcément le mouvement dans un système de points, que souhaitait élargir E Macron en 2017. Pour votre information, ces fonds à point (retraites complémentaire et capitalisée) font moins bien que l’inflation sur 20 ans, moins que le régime obligatoire. De même, ces fonds de pensions qui se nourrissent, finalement, sur les marchés financiers, de nos impôts et la valeur ajoutée du travail avec des dividendes, et du salaire des souscripteurs, ont des frais qui dégradent encore plus les résultats.
Cela n’importe quel citoyen un peu informé le sait. D’autres acceptent sans réfléchir une retraite obligatoire par capitalisation comme la RAFP. En effet, la retraite par capitalisation n’est pas un mal en soi, on est libre de perdre son argent sur les marchés financiers, mais ce n’est plus le cas lorsqu’on y est obligé. Cette obligation renvoie alors à prendre des risques sur son épargne, ce qui ressemble furieusement à du racket. Ajouté à l’absence de séparation des banques de dépôt et d’affaire, ces fonds de pension mettent en risque votre épargne.
Ils constituent alors des assurances pour les assureurs et les banquiers de l’usage de nos impôts pour les refinancer lors des crises. Du racket individuel nous passons au racket collectif.
Mais pour finir faisons un peu de prospective. La retraite par capitalisation se nourrit d’abord de vos salaires, le chômage la met en difficulté, tout comme la retraite par répartition. L’arrivée du monde multipolaire modifiera le fonctionnement des marchés financiers, aussi les fonds épargnés sur 30 ans sont très risqués. L‘arrivée de l’IA ferait disparaître 10% des métiers et plus de 50% des tâches dans 50% des métiers selon les rapports gouvernementaux. Aujourd’hui, 28 millions de personne travaillent en France. Dans un marché unique, cette technologie conduira donc à des suppressions d’emplois, par exemple avec 15 % de création d’emplois due à l’IA, il reste 20% d’emplois supprimés, le compte est de 5 millions de chômeurs en plus. Ne devrions-nous pas nous interroger sur le marché unique et donc le fédéralisme européen néolibéral dans le cadre des retraites ?