Cantona : 1- Lagarde : 0

Cantona : 1- Lagarde : 0

Mercredi 8 décembre 2010, par André Bellon

«  Éric Cantona est "un immense footballeur", mais il ferait mieux de ne pas se mêler d’économie ».
Telle est la réaction de la ministre de l’économie à l’appel lancé par Eric Cantona à ses concitoyens. En demandant aux Français de vider leurs comptes en banque, Cantona a posé avec force un problème, celui du rapport entre les banques et les citoyens.
Madame Lagarde, dont le métier aux Etats-Unis, avant sa nomination à Bercy, était de défendre les intérêts des entreprises américaines contre les entreprises françaises, n’est certainement pas la plus à même de donner, de façon méprisante, des leçons d’intérêt national. Contrairement d’ailleurs à ce que dit Madame Lagarde, Eric Cantona ne parle pas d’économie, mais des intérêts des citoyens. Il faut ainsi lui reconnaître le mérite d’avoir fait émerger une question que tous les dirigeants se gardaient bien d’évoquer, à savoir la responsabilité sociale des banques.
Depuis plusieurs décennies, la loi oblige les Français a avoir un compte en banque pour y percevoir leurs revenus. Ils sont donc dépendants des institutions financières alors que l’inverse est actuellement inimaginable. Les banques font ce qu’elles veulent avec cet argent et, au vu des évènements récents, pas toujours le meilleur. Elles risquent même de dilapider des sommes considérables dans le cadre d’opérations strictement privées, créant ainsi le chaos que semble redouter Madame Lagarde.
Il est, cela étant, exact, ainsi que l’a estimé mercredi la ministre de l’Économie et des Finances, que le fait de vider les comptes bancaires ferait "écrouler le système".
"Chacun son métier. Il y en a qui jouent magnifiquement au football, je ne m’y risquerais pas. Je pense qu’il faut intervenir chacun dans ses compétences", a-t-elle ainsi lancé en réponse à des journalistes. Oui, mais si, justement, son métier est d’empêcher la catastrophe, elle est, en fait, la garante d’un système injuste autant qu’absurde qui mène précisément à la catastrophe.
Et c’est là tout le problème. Car si Cantona a révélé au grand jour ce système, il faut maintenant prolonger et donner un sens au mouvement en tirant les conséquences politiques, à savoir la question du pouvoir. Si les banques fonctionnent grâce à notre argent, elles sont, de ce fait, notre bien. Leur fonctionnement devrait tenir compte de l’intérêt général et la question du contrôle des circuits financiers par la société doit être posée avec force.