La Tunisie en attente d'une Constituante

La Tunisie en attente d’une Constituante

Lundi 21 février 2011, par J.M.

Depuis la grande avenue Habib Bourguida, d’où sont parties les manifestations ayant conduit, il y a quelques semaines, à la chute de la dictature du président Ben Ali, des milliers de Tunisiens, éclaireurs et héroïques [1], s’étaient rassemblés, en cette fin de semaine, pour exiger la convocation d’une Assemblée nationale Constituante. Dimanche exactement. Véritable clé de la démocratie pour sortir d’une situation de crise politique majeure à l’échelle nationale, l’appel à une Constituante, comme nous l’envisageons également en France, depuis plus de deux années, a relevé, en Tunisie, d’une exigence bien palpable et légitime : sortir de l’impasse du despotisme, vivre en démocratie, restaurer la souveraineté populaire. Depuis la chute du président Ben Ali, un gouvernement provisoire, de transition, dirigé son ancien Premier Ministre, M. Mohamed Ghannouchi, n’est pas parvenu, en effet, à satisfaire le peuple tunisien. La colère des manifestants exprimant un sentiment de révolte quant à un éventuel blocage de la situation révolutionnaire, par ce proche collaborateur de Ben Ali, est fort compréhensible. Sa présence au pouvoir compromet en grande partie l’instauration d’une nouvelle République. A ce titre, force est de constater que les juristes tunisiens, appuyant particulièrement les manifestants à cette occasion, ne manquent pas d’arguments pour soutenir la convocation immédiate d’une Constituante dans le pays. Ainsi, par exemple, l’ancien doyen de la faculté de droit de Tunis, M. Sadok Belaid, explique fort à propos que l’élection d’une Constituante, « chargée de rédiger une nouvelle Constitution qui va fonder une nouvelle ère républicaine » est un impératif démocratique. « La solennité de l’événement veut que ce soit le peuple souverain qui en déclenche le mouvement et qui en clôture l’accomplissement », poursuit-il (La Presse de Tunisie, 20 février 2011 ). De même, le professeur de droit constitutionnel M. Kaïd Saïd ne manque pas d’insister sur la portée d’une Assemblée Constituante, pour en finir en particulier avec la pratique des décrets-lois orchestrée, aujourd’hui, par le gouvernement de transition : « L’actuel gouvernement provisoire doit préparer non pas l’échéance électorale présidentielle, mais l’élection d’une nouvelle Assemblée Nationale constituante » [2] . La Constitution tunisienne est donc, désormais, à réécrire. Les institutions à remplacer. Le nouveau gouvernement à élire. La souveraineté du peuple à établir. C’est par le dynamisme d’un tel mouvement populaire qu’en Tunisie, comme en France, le droit constitutionnel pourra, enfin, refléter les aspirations démocratiques des citoyens. Une Constituante en est la méthode.

2 Messages

  • La Tunisie en attente d’une Constituante

    Le 26 février 2011 à 20:59 par Réjean Dumais, ing.

    Bonjour !
    Je suis bien d’accord avec la constituante mais je suis un peu curieux de savoir comment vont être élues, choisies ou désignées les personnes qui la composeront.
    J’imagine qu’il y aura beaucoup à faire à ce niveau en Tunisie, et ce, très prochainement après l’obtention d’une certaine stabilité et paix sociale.
    Moi, je préconise l’utilisation d’un minimum de critères (âge, répartition géographique, ou tout autre critère, déjà en place pour les élections, mais surtout un moyen d’offrir à chaque personne intéressée une chance égale de contribuer à ce travail primordial). Le tirage au sort pourrait constituer une partie du moyen pour le choix final d’un nombre de personnes représentatives de l’ensemble de la population du pays. Qu’on pige, à même une liste de femmes ou d’hommes, d’une certaine tranche d’âge, de type de croyance, de formation académique, ou autre, il s’agit d’obtenir des gens intéressés et représentatifs de l’ensemble du pays. On pourra utiliser le tirage au sort dans la mesure où les gens considèrent qu’il permet de placer chaque personne sur un pied d’égalité.
    Sans avoir fouillé la constitution existante, je ne croix pas qu’elle prévoit la méthode de mise en place d’une constituante. Je crois que l’organisation des Nations unies doit travailler à la mise en place de ce type de moyen de renouvellement des démocraties déjà en place, problématiques ou pas, mais carrément de leur mise en place suite au genre de soulèvement populaire que vit actuellement la Tunisie.
    J’espère que ces réflexions pourront servir !
    Bonne fin de journée ! Réjean Dumais, ing.

    • La Tunisie en attente d’une Constituante

      Le 28 février 2011 à 19:27 par Jérémy Mercier

      Merci pour votre commentaire. Vous parlez à juste titre de propositions procédurales (le processus de la Constituante), qu’il serait à mon avis prématuré et présomptueux, pour un seul être, ou notre Association, de définir avant que les citoyens ne se soient exprimés collectivement (votes, débats, analyses, propositions, etc.). Quelque mérite que nous puissions avoir en terme de diffusion de l’idée de constituante, nous ne voulons pas définir par avance la Constitution qui ne peut résulter justement que de la Constituante. C’est la raison pour laquelle nos activités valorisent cette notion politique, aujourd’hui dévalorisée. Pour parler du tirage au sort, ou de la Constitution, il est bien clair, que le tirage au sort peut être défendu par certains, ce qui n’est pas notre cas car il ignore le débat qui détermine les choix (des idées, des programmes). Voir http://www.pouruneconstituante.fr/spip.php?article62. Et pour la Constitution, l’essentiel est de rapprocher l’ensemble citoyens de la préoccupation constitutionnelle, afin que ce soit eux-mêmes, donc vous, qui participiez à en écrire une nouvelle. Il va de soi que les règles actuelles ne permettent pas directement ce processus. C’est pourquoi il convenait et convient toujours de l’exiger dans le début public.
      Cordialement

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