Plus uni que moi, tu meurs !

Plus uni que moi, tu meurs !

Samedi 21 février 2015, par André Bellon

Les évènements se suivent et se ressemblent. Après l’union nationale contre le terrorisme prônée par le Président de la République, les jours derniers ont vu les appels au Front républicain contre le Front national dans le Doubs, puis à l’Union autour du premier ministre pour voter la loi Macron.

Il est évidemment bon de vouloir rassembler autour des valeurs républicaines, pour la sécurité publique ou pour la laïcité et, de façon générale, pour l’intérêt national.

Encore faut-il que ces appels soient autre chose que des cris d’opportunité ; encore faut-il qu’ils soient liés à une véritable politique de défense des principes proclamés ; encore faut-il qu’ils permettent de donner enfin la parole et la maîtrise des choix aux citoyens à qui on demande de se rassembler. Union de qui, autour de quoi ? Le Front républicain est-il un Front ? Est-il républicain ? L’asservissement du Parlement est-il républicain ? L’onction du suffrage universel, faut-il le réaffirmer, ne confère pas, en République, une autorité sans contrôle.

Les discours sur l’union sont trop souvent le paravent qui cache des tactiques destinées à rassembler simplement la classe politique : union discutable si elle n’est que jeu d’appareils ou enjeux électoraux, en tout cas pas républicaine par principe. Car les dernières décennies ont souvent montré la convergence des principales forces politiques autour des visions communautaires plutôt que laïques, sur l’assujettissement aux intérêts financiers plus qu’au respect des aspirations populaires, sur un désir monomaniaque de soumission à une vision féerique de la construction européenne plutôt qu’à une quelconque prise en compte des intérêts nationaux.

Ce n’est pas que le peuple, souverain parait-il, ne s’intéresse pas à la politique. C’est qu’il ne ressent pas la décision publique comme s’intéressant à lui, qu’il la vit comme une chose extérieure, ce qui n’est évidemment ni républicain, ni démocratique. Est-il utile de rappeler le 29 mai 2005 et le coup d’état qui a suivi ? Sur des bases pareilles, appeler au rassemblement ne peut au mieux n’être qu’un feu de paille, plus fondé sur une émotion que sur une adhésion, et donc contreproductif une fois la crise passée. Pire, ce peut être un appel à la discipline, à la sanction de toute contradiction, comme l’a démontré et même affirmé Manuel Valls en utilisant l’article 49-3 le 19 février.

Si nous insistons depuis dix ans sur la nécessité de l’élection au suffrage universel d’une Constituante en France, c’est pour rappeler les symboles qui, dans l’histoire de France, ont marqué la recherche d’une vraie légitimité démocratique populaire et la nécessité de rassemblements porteurs de sens dans des phases de crise profonde.

C’est parce qu’en dehors de cette option, l’absence de vrai débat va finir par officialiser la conception autoritaire de la politique. On n’en est pas loin.

Il est encore temps de réagir.

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