Agriculture : le chaos en marche ?

Agriculture : le chaos en marche ?

Dimanche 25 février 2024, par Michel Lamboley

L’année commence mal pour le gouvernement, les agriculteurs sont passés des champs aux routes. Le mouvement des agriculteurs en France relaie celui des Allemands dont le modèle de concertation est en crise

Les dettes bancaires étranglent les agriculteurs et certains cassent des biens publics. Curieusement, ils ne s’en prennent pas aux banques. Contrairement aux salariés, le gouvernement ne les qualifie pas de casseurs. Les petits patrons agricoles critiquent les produits importés à bas prix sans respect des normes européennes de production. Loin du fond politique, la question des médias était : G Attal gérera-t-il la situation ? Or, cette crise européenne montre les limites de la Politique Agricole Commune. Certains agriculteurs n’interrogent pas le modèle productiviste, ils veulent des aides conformément au schéma historique européen qui perfuse, avec nos impôts, la production agricole. L’industrie agroalimentaire européenne est alors compétitive dans le marché mondial.

La FNSEA (le principal syndicat agricole), les lobbies agroalimentaires et l’UE portent le libre-échange. En effet, la balance commerciale agricole est excédentaire en France. Aussi, ouvrir les marchés accroît l’excédent. Néanmoins, dans « l’agriculture », des activités sont en déficit récurrent comme l’élevage. Les importations de viandes augmentent, elles ne sont pas toujours dues à la hausse de la consommation (certaines diminuent) mais à la baisse de la production française. Or la grande partie des viandes importées viennent d’Europe ou du Royaume Unis. Le marché européen détruit les productions locales par les prix, les traités mondiaux (Mercosur) n’arrangent rien. L’industrie de l’élevage s’éteint en France.
Avec l’impact des élevages sur le réchauffement climatique, la culpabilisation incessante du citoyen, qui n’achète pas, et de l’agriculteur, qui ne produit pas, ce qu’il faut, est imbécile. L’importation vient principalement des cantines et de la restauration collective avec des centrales d’achats européennes. La loi Egalim ne contrôle pas la concurrence. Produire une viande de qualité locale, moins émettrice, suppose que la restauration collective l’intègre. Elle signifie des lois efficaces, écologiquement et économiquement, non l’agitation médiatique et législative. Ainsi les coûts de transport pourraient faire l’objet d’un impôt progressif selon les distances pour les marchandises.

Ensuite, la souveraineté alimentaire consiste à nourrir notre population avec notre production. En cas de crise alimentaire les autres pays la garderont. De même, seul le maintien de toutes les activités agricoles préservera la ruralité. Pourquoi les agriculteurs, qui font des profits grâce au marché européen, ne les distribuent pas dans un fonds de solidarité pour leurs collègues en difficulté économique ? Les bénéficiaires agricoles de la mondialisation y trouveraient un puissant bénéfice. Le renforcement de toutes les branches garantit une sécurité d’approvisionnement et des débouchés locaux. La souveraineté est l’action collective du peuple et donc, en premier lieu, des agriculteurs.

Le marché européen a créé une machine à tuer une grande partie de la ruralité. Nous allons vers des champs vides, silencieux, parsemés de grandes étendues cultivées. Le grand vide rural s’approfondit avec la concurrence libre et non faussée européenne. Ce néant met en danger les urbains qui ne produisent aucune nourriture. Reconquérir la souveraineté, c’est combler le néant, retrouver notre liberté collective et donc la république. Sans souveraineté ce n’est pas la république qui marche mais le chaos.