Au nom du commerce

Au nom du commerce

Samedi 30 mars 2024, par André Bellon

Il y a quelque chose de pourri dans le fonctionnement des institutions européennes. On parle de démocratie en permanence à Bruxelles, mais c’est bien souvent pour la bafouer.

2005 a été un tournant dans notre histoire. Un traité rejeté par les Français lors du référendum du 29 mai a été validé par le congrès à la demande du nouveau Président de l’époque, Nicolas Sarkozy et avec l’aide du Président du parti socialiste, François Hollande. La confiance des citoyens envers leurs élus et, accessoirement, envers Bruxelles, a amorcé sa plongée.

Elle se poursuit aujourd’hui avec un autre traité dénommé le CETA, un accord commercial entre l’Union européenne et le Canada. Curieusement, le fonctionnement de l’Union européenne permet de mettre en œuvre un traité alors même qu’il n’a pas été ratifié par tous les Etats-membres. C’est le cas de la France où le texte, approuvé par l’Assemblée nationale en 2019, devait encore être validé par le Sénat cinq ans après, le gouvernement rechignant à terminer le processus constitutionnel de ratification. Pourtant, - merveille des institutions européennes -, le traité CETA s’applique depuis 2017. Mais, il existe parfois des portes secrètes. Ainsi, le groupe communiste au Sénat a-t-il demandé le vote en utilisant sa « niche parlementaire » et a obtenu, au Sénat, la non-ratification du traité grâce au vote des députés LR. Depuis lors, le gouvernement joue la montre et refuse revenir vers l’Assemblée nationale, en tous cas avant les élections européennes.

Telle est, et nous le dénonçons depuis longtemps, la réalité des atteintes de plus en plus frontales à la démocratie aujourd’hui. En ce monde où les traités internationaux priment sur le droit français, était-il utile d’en donner cette nouvelle illustration ? Depuis le tournant mondialiste des années 1980, la démocratie est mise en pièces au nom d’un intérêt dit supérieur et tout entier dans le commerce mondialisé. Ce ne sont plus les intérêts sociaux qui prédominent ni la volonté des peuples, aujourd’hui très en colère contre les dégâts du libre-échange comme l’a illustré la révolte des agriculteurs.

Et la « gauche » comme la « droite » mènent le bal. Rappelons la prière émouvante de Pascal Lamy, alors membre du Parti socialiste et commissaire européen, déclarant, au soir de l’échec du sommet de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à Cancun en septembre 2003 : « Il n’y a que des perdants, de même d’ailleurs qu’il n’y aurait eu que des gagnants si nous nous étions mis d’accord à Cancun ».

Rien de nouveau sous le soleil !

Voir dans la revue politique et parlementaire https://www.revuepolitique.fr/au-nom-du-commerce/