L’individu ingouvernable
Jeudi 31 décembre 2015, par
Roland Gori, L’individu ingouvernable, Les liens qui libèrent (LLL), 2015, 22,50 €.
Sans céder au « démon de l’analogie », l’auteur démontre les liens étroits qui, depuis la fin du XIXe siècle, unissent les crises politiques des libéralismes aux discrédits des institutions parlementaires, à l’émergence des populismes, et aux violences destructrices des guerres et des terrorismes. A chaque fois le monde de la sécurité, établi sur les promesses de la raison, de l’autonomie de la volonté individuelle, de l’émancipation par le progrès des techniques et des sciences, … à chaque fois ce monde s’effondre. A chaque fois, la liberté et l’égalité se révèlent comme des valeurs abstraites, réduisant l’espace authentique du politique comme peau de chagrin. A chaque fois l’accroissement des richesses collectives s’accompagne du profit de quelques-uns aux dépens de tous. Or, l’abandon des peuples à leur misère matérielle et culturelle constitue le « fonds de commerce » des extrémismes, des populismes et des haines sociales.
L’ouvrage montre également comment l’émergence de la psychanalyse, et plus généralement des sciences sociales ou du darwinisme à la fin du XIXe siècle, constituent des révolutions symboliques qui mettent à terre les vieilles prétentions libérales d’un sujet auto-entrepreneur de son destin. Si ces révolutions symboliques ont tant bien que mal entretenu des visions humanistes du social, elles ne sont pas parvenues à transformer durablement la société.
Comment sortir de cette logique d’une masse d’individus déçus et désespérés ? Comment rétablir la vie politique dans un monde intellectuellement et moralement ruiné par la religion du marché ? Comment écarter cette démocratie sécuritaire qui se profile au nom de la lutte contre les terrorismes ? Comment refonder un nouvel humanisme riche des expériences dont nous sommes les héritiers ?