Etat d’urgence
Mercredi 5 décembre 2018, par
D’après la presse (*1), pour faire face au mouvement des gilets jaunes, des syndicats de policiers ont demandé l’instauration de l’Etat d’urgence et le renfort de l’armée. Rien que ça !
Il s’agit du syndicat "Alliance" (*2), qu’on dit proche de LR, du syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN) et Synergies-Officiers.
A ma connaissance, seul le syndicat France-police-Policiers-en-colere (*3) dénonce la dérive autoritaire du pouvoir. Saluons cette prise de position.
Nous savons que la police est davantage destinée à protéger les gouvernants contre les gouvernés que l’inverse.
Mais les gilets jaunes posent des questions importantes de justice fiscale, de Constituante et de République, de vivre-ensemble, et sont soutenus par une large majorité de Français. Ce conflit prend l’allure d’un conflit entre l’Etat et la nation. Les gilets jaunes sont un conflit entre une revendication populaire et l’Etat. Il n’y a là rien de surprenant, la démocratie c’est aussi l’irruption populaire contre l’ordre institutionnel d’Etat injuste.
Christophe Castaner a dit ne pas rejeter a priori cette possibilité d’installer l’Etat d’urgence.
Au moment où certains dispositifs de l’Etat d’urgence ont été intégrés dans la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, Christophe Castaner ( ex PS, rappelons-nous ) n’avait pas hésité à dire : "Je considère que je n’ai pas à avoir peur des moyens de lutte contre le terrorisme parce que je ne me sens pas terroriste".
Gageons qu’aujourd’hui, Christophe Castaner, devenu ministre de l’intérieur, dirait : "Je considère que je n’ai pas à avoir peur des moyens de lutte contre les gilets jaunes parce que je ne me sens pas gilet jaune."
Votée par une très large majorité d’élus ( *4 ) surtout membres de LREM, MODEM, UDI, Nouvelle gauche ( ex PS proche de Valls ), il n’y a guère que la France insoumise, les communistes et une partie de LR qui s’y était opposé.
Pourtant, les menaces sur les libertés démocratiques avaient été identifiées et des alertes nombreuses avaient été émises : LDH, ONU, syndicat de la magistrature, Amnesty internationale, Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) ... des personnalités comme par exemple Patrick Weil, François Sureau, Edwy Plenel déjà cité etc.
Rappelons que les mesures de l’Etat d’urgence ont été mises en œuvre en 2015 pour empêcher des manifestations d’écolo au moment de la COP 21.
Elles ont été réactivées au moment de la loi travail.
Pour rappel, cette loi renforce l’arbitraire de l’Etat en supprimant ou réduisant le contrôle du juge. Au prétexte de menace terroriste, notion non définie et donc extensible, le pouvoir exécutif et le préfet peuvent interdire des manifestations, assigner à résidence des "suspects", perquisitionner les domiciles, interdire un territoire à certains, étendre les contrôles d’identité, les fouilles.
D’aucuns, dont je fais partie, considèrent que le capitalisme peut très bien se passer de la démocratie. Il est même certain que le capitalisme ne peut pas supporter la démocratie. C’est d’ailleurs ce que Milton Friedman et Friedrich Hayek, théoriciens du néolibéralisme, les pères spirituels de Macron en quelque sorte, avait honnêtement reconnu. Hayek : « Personnellement je préfère un dictateur libéral plutôt qu’un gouvernement démocratique manquant de libéralisme ... ». Le Chili de Pinochet est là pour nous le rappeler.
Jusqu’où ce gouvernement ira-t-il dans l’injustice et la répression ? Nul ne peut le dire mais il est probable qu’il est décidé à aller plus loin que d’autres avant lui en France.
Il faudra s’en protéger.
Cordialement,
Didier
Notes :
*2 : http://www.alliancepn.fr/media/show/insurrectionnel-19953
*4 : http://www2.assemblee-nationale.fr/scrutins/detail/(legislature)/15/(num)/138
En pièce jointe, le tract distribué par Didier Brisebourg dans la manifestation des gilets jaunes d’Hyères et le même tract mis sous une autre forme par Hubert Viallet de Marseille