Comment Berlin dicte à la France la loi Khomri
Dimanche 24 juillet 2016, par ,
Les débats autour de la loi El KhomrI ont été d’une remarquable intensité. Mais ils ont souvent fait l’impasse sur l’origine de cette loi. Les langues se délient aujourd’hui sur l’origine bruxelloise de ce texte. Le 12 juin 2016, un article de Martine Orange dans Mediapart démontre que l’ordolibéralisme allemand métamorphosé en néolibéralisme universel impose son diktat désastreux à toutes les politiques économiques en Europe.
Rajoutons à cet article les déterminismes juridiques et politiques qui cristallisent et renforcent cette hégémonie. En réalité l’ordolibéralisme est inscrit dans le marbre de la constitution allemande de telle sorte que le conseil constitutionnel de Karlsruhe peut juger une directive européenne de politique économique hétérodoxe comme anticonstitutionnelle. Dès lors il ne peut pas y avoir unanimité dans les instances bruxelloises de telle sorte que l’ordolibéralisme ne peut que s’imposer à tous les pays européens via le traité de Maastricht.
Le pétainisme structurel et récurrent de l’oligarchie française, très bien analysé par Alain Badiou dans son pamphlet contre Sarkozy, aboutit à une capitulation devant l’hégémonie économique allemande et à une collaboration avec ce qui n’est pas encore un quatrième Reich économique mais qui ne saurait tarder à le devenir. Lorsque François Hollande a prétendu renégocier les traités avec Angéla Merkel, il a, en réalité, capitulé en passant un marché avec le bon docteur Schaüble.
Par cet accord, Hollande a obtenu le soutien de l’Allemagne pour que Bruxelles ferme les yeux sur les déficits budgétaires et l’endettement de la France qui transgresse les critères de Maastricht moyennant un engagement à faire ce qu’on appelle pudiquement "les réformes structurelles" qui consistent à détruire les protections des salariés et l’État-providence. Cela explique le jusqu’au-boutisme et l’autoritarisme grandissant de notre gouvernement et sa dérive progressive vers un État policier comme l’état d’urgence reconduit de manière répétée lui en offre l’occasion.
La constitution la plus démocratique d’Europe, celle de l’Allemagne, et la gestion des entreprises la plus démocratique compte tenu de la cogestion et de la force des syndicats allemands, est compatible avec une colonisation des autres pays européens.
Après tout, l’histoire semblable de la France et de la Grande-Bretagne montre comment une démocratie parlementaire dans les métropoles est parfaitement compatible avec la domination non démocratique et l’exploitation économique des colonies.
Je comprends également pourquoi le soi-disant cercle de la raison s’obstine dans des politiques économiques que même le FMI reconnaît comme inefficaces et injustes. En réalité les choix économiques de notre pays ne sont pas faits rationnellement mais résultent du diktat allemand.