Chronique d'une mise à mort annoncée de la souveraineté du peuple

Chronique d’une mise à mort annoncée de la souveraineté du peuple

Vendredi 6 juillet 2018, par Denys Renaud

L’élection en France d’Emmanuel Macron marque un tournant historique. Si jusqu’alors l’oligarchie financière cherchait à promouvoir l’élection de l’homme politique le plus à même de représenter ses intérêts, cette fois, ne se préoccupant plus de passer par la classe politique, elle met sur orbite un candidat qu’elle choisit elle-même au sein de ses propres rangs.

Ainsi Emmanuel Macron se trouve être le premier président à ne pas venir du monde politique à l’instar de son mouvement “La république en marche”, juste sorti du chapeau pour l’occasion, de même pour la quasi-totalité des députés élus sous ce label.

Après la cascade de privatisations neo-libérales déjà réalisée, nous sommes à présent devant une nouvelle étape, la plus grave, celle qu’on n’osait même pas imaginer, à savoir carrément la privatisation du pouvoir politique lui-même.

C’est dans cette logique que s’inscrit l’agenda des réformes institutionnelles dont l’objectif est de verrouiller, en créant un point de non retour, cette privatisation de l’appareil politique.

Si la constitution de 1958, sous couvert d’éviter l’instabilité gouvernementale, affaiblissait déjà considérablement le pouvoir de la représentation nationale au profit de l’exécutif, les réformes ultérieures ne viendront qu’aggraver ce déséquilibre inquiétant : élection présidentielle au suffrage universel (1962), passage au quinquénnat (2000), inversion du calendrier électoral (2002) etc...

C’est dans ce contexte constitutionnel aux relents déjà très “bonapartistes” que vient se présenter aujourd’hui ce nouveau train de réformes institutionnelles programmé par E.Macron :

=> “diminution de 30% des députés et sénateurs, injection d’une dose de 15 % de proportionnelle, limitation des mandats, suppression de la Cour de Justice de la République, redécoupage des circonscriptions et nouvelles répartitions, etc...”

Or, ce nouveau paquet de réformes ne peut qu’éloigner encore plus les citoyens de leur représentation nationale, faire des futurs députés de simples “parlementaires hors-sol” et de l’hémicycle une simple Chambre d’enregistrement totalement coupée de la Nation.

S’appuyant sur son pendant que constitue dans la même logique la Réforme territoriale avec ses fusions de communes, c’est alors le peu de démocratie locale encore restant qui va partir en fumée et c’est une mainmise sur les plus petites collectivités locales par les grands partis devenant ainsi d’autant plus hégémoniques qu’ils sont de moins en moins représentatifs de la Nation et de moins en moins au service de l’intérêt général. Sur la plan extérieur, l’agression militaire contre la République Arabe Syrienne, sans mandat, sans déclaration de guerre, non seulement constitue une grave violation délibérée de la Charte des Nation Unies et dégrade profondément l’image de la France, mais cette décision du Prince, sans vote ni consultation du Parlement constitue un nouveau déni de démocratie, un mépris suprême de la souveraineté populaire.

Derrière cet arsenal de réformes, concoctées dans des officines et think tanks bien à l’écart des citoyens, on perçoit les intentions qui se profilent : la démocratie coûte trop cher, l’imprévisibilité du corps électoral comportent trop d’incertitudes, trop de risques pour le monde des affaires. Il faut surtout prévenir le risque de retour à toute forme d’état redistributeur qui pourraient limiter les profits financiers.

Ainsi s’annoncent dans le même paquet simultanément : la fin programmée à la fois du Code du Travail, du Droit International, des contre-pouvoirs, une véritable mise en curatelle de la Représentation Nationale, un alignement servile sur la géopolitique des Puissances étrangères du moment ….

Il s’agit de dissoudre la souveraineté populaire en même temps que la souveraineté nationale et si possible les états-nations eux-mêmes, et cela, par-delà même l’UE, dans le magma néo-libéral d’un Nouvel Ordre Mondial où les intérêts nationaux devront s’effacer, tant devant les intérêts hégémoniques impériaux que devant ceux des instances financières mondialisées.

Il est temps d’anticiper le risque et de faire partager à nos concitoyens la nécessité impérieuse d’une nouvelle assemblée constituante.

Denys Renaud, Nantes

Cet article a par ailleurs été publié par Grande relève. Voir l’article en pièce jointe ci-dessous

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