Union européenne, le déni de souveraineté des États

Union européenne, le déni de souveraineté des États

Dimanche 9 mai 2021, par Jean-Luc Picard-Bachelerie

Chaque mois, la Commission européenne adresse des avis motivés aux pays ayant commis des infractions. Au mois d’octobre 2020, dix avis ont été lancés (Principales décisions ci-dessous).

- Libre circulation des marchandises : la Commission demande à la FRANCE de supprimer les obstacles aux importations parallèles de médicaments vétérinaires. Or les mesures françaises, en subordonnant ces importations à des redevances administratives très élevées, restreignent de facto la possibilité d’importer en parallèle.

- Facturation électronique : la Commission demande à la BULGARIE et à la HONGRIE de transposer intégralement les nouvelles règles.

- Reconnaissance des qualifications professionnelles : la Commission demande à CHYPRE, à l’ALLEMAGNE, à MALTE et à la SLOVAQUIE de se conformer aux règles de l’UE. Ces règles facilitent la reconnaissance des qualifications professionnelles dans les pays de l’UE, ce qui permet aux professionnels de fournir des services dans toute l’Europe, tout en garantissant une meilleure protection des consommateurs et des citoyens.

- Code frontières Schengen : l’ESTONIE invitée à supprimer les conditions supplémentaires appliquées au franchissement des frontières terrestres extérieures pour sortir de l’UE. À l’heure actuelle, l’Estonie demande aux voyageurs qui souhaitent quitter l’Union de réserver une place dans une file d’attente pour franchir la frontière et de payer la réservation et l’utilisation de la zone d’attente.

- Asile : la Commission demande instamment au PORTUGAL de mettre intégralement en œuvre la directive relative aux procédures d’asile pour l’examen des demandes de protection internationale dans l’UE.

- Migration : la Commission demande à la HONGRIE de donner accès à la procédure d’asile conformément au droit de l’Union. Selon les nouvelles procédures hongroises, avant de pouvoir demander une protection internationale en Hongrie, les ressortissants de pays tiers doivent d’abord faire une déclaration d’intention dans laquelle ils affirment leur volonté de demander l’asile auprès d’une ambassade hongroise en dehors de l’UE et de se voir délivrer un permis d’entrée spécial à cet effet.

- Politique antidrogue de l’Union : la Commission demande instamment à l’IRLANDE de mettre en œuvre les règles de l’UE qui consistent à ajouter de nouvelles substances psychoactives à la définition du terme « drogue » figurant dans la décision-cadre.

Deux infractions retiennent particulièrement l’attention. Celle sur le secret des affaires à Chypre et celle de la libre circulation des marchandises et liberté d’établissement en Bulgarie.

- La Commission décide de saisir la Cour de justice d’un recours contre CHYPRE pour défaut de transposition de la directive sur les secrets d’affaires. Elle demande à la Cour d’ordonner le paiement de pénalités financières parce que ce pays n’a pas notifié de mesures de transposition des règles relatives à la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués.

On voit que cette règle que la France de Macron a choisi de mettre en œuvre est en fait l’application d’une directive européenne. Sous cette fallacieuse disposition, ce sont les lanceurs d’alerte qui sont directement visés protégeant ainsi les entreprises.

- La Commission demande à la BULGARIE de supprimer les mesures discriminatoires obligeant les détaillants à privilégier les produits alimentaires nationaux.

"La Commission européenne a décidé aujourd’hui d’adresser un avis motivé à la BULGARIE concernant les mesures discriminatoires qui contraignent les détaillants à privilégier les produits alimentaires nationaux. La législation bulgare oblige les détaillants à placer dans des espaces d’exposition et de vente distincts les produits alimentaires nationaux tels que le lait, le poisson, la viande fraîche et les œufs, le miel, les fruits et les légumes. Ces obligations portent atteinte à la libre circulation des marchandises, consacrée par l’article 34 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), car elles créent des conditions de commercialisation plus avantageuses et plus compétitives pour les produits alimentaires nationaux, ce qui constitue une discrimination à l’égard des produits importés similaires. Elles entravent également la liberté d’établissement inscrite à l’article 49 du TFUE, en limitant la liberté des détaillants de décider de leur assortiment et de l’agencement de leur surface de vente et d’adapter leur chaîne d’approvisionnement. En raison des circonstances extraordinaires dues à la situation sanitaire liée au coronavirus et à l’affaiblissement des économies de l’UE, il est impératif de préserver la libre circulation des marchandises et la liberté d’établissement dans un esprit de solidarité européenne. La Commission avait déjà envoyé une lettre de mise en demeure en mai et elle y donne à présent suite par un avis motivé. La Bulgarie dispose à présent d’un délai de deux mois pour répondre aux arguments soulevés par la Commission ; à défaut, cette dernière pourrait décider de saisir la Cour de justice d’un recours contre cet État membre."

Cet exemple de mise en demeure de la Bulgarie signifie qu’il est interdit aux pays d’organiser le commerce en circuit court et donc d’être, non seulement, autonomes en alimentation mais surtout d’avoir une action efficace contre le réchauffement climatique.

Si les premières intentions d’une union des États européens au lendemain de la seconde guerre mondiale était de consolider la paix sur le continent, on voit désormais qu’elles ont largement évolué pour un système économique dont on voit depuis des années les méfaits sociaux, écologiques et politiques mettant à mal l’exercice de la démocratie par des peuples ne sachant plus très bien s’ils sont encore souverains.

https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/INF_20_1687