Le climat, alibi d'un nouvel asservissement

Le climat, alibi d’un nouvel asservissement

Samedi 28 septembre 2019, par Anne-Cécile Robert

Un mot : climat

Cherchant à répondre au mouvement des Gilets jaunes, le président Emmanuel Macron a lancé un « Grand débat national » qui l’a mobilisé pendant plusieurs semaine au printemps 2019. L’opération relevait davantage de la communication que de la recherche de solutions de fond aux revendications sociales et politiques, pour la plupart légitimes, des Gilets jaunes. Peu médiatisée à ce jour, la Convention citoyenne pour le climat (CCC), figure parmi les rares initiatives concrètes issues de ce tour de chant présidentiel.

La CCC repose sur des mécanismes surprenants en France.

Une « assemblée citoyenne » de 150 personnes tirées au sort à partir de l’annuaire téléphonique se réuniront durant six samedis-dimanches à partir du 4 octobre. Aidées par des experts, elles auront pour mission de formuler des propositions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) françaises.

L’écrivain Thierry Pech et l’économiste Laurence Tubiana (économiste spécialiste de l’environnement) présideront la CCC sous le regard de trois "garants" dont le rôle est de veiller à l’indépendance et au bon déroulement des travaux : Anne Frago (directrice du service culture et questions sociales de l’Assemblée nationale), Michèle Kadi (ancienne directrice des missions institutionnelles du Sénat) et l’écrivain et réalisateur Cyril Dion.

Ce dernier se montre particulièrement enthousiaste car il milite depuis longtemps pour ce qu’il appelle une « démocratie délibérative » destinée à pallier les insuffisances de la représentation politique.

« Notre modèle de démocratie représentative ne permet pas de prendre les mesures radicales nécessaires pour faire face aux défis actuels, explique-t-il à WeDEmain. L’objectif de la Convention citoyenne est de formuler des propositions pour réduire d’au moins 40 % nos émissions d’ici 2030 … Notre pari est de créer un rapport de force avec le gouvernement, depuis l’intérieur. D’élaborer des propositions dans un cadre approuvé par le gouvernement, puis d’obtenir un référendum ».

Renouveler les pratiques politiques est, certes, une nécessité criante tant les mécanismes institutionnels actuels semblent tourner à vide, comme en suspension au-dessus des réalités sociales. De même, ouvrir des espaces de discussion ne peut que contribuer à faire circuler les informations et à améliorer la participation des citoyens aux enjeux publics.

Cependant, la CCC repose sur des biais déformants. Le premier est naturellement le tirage au sort, fausse bonne idée basée sur le principe que le milieu social détermine mécaniquement la pensée. Comme si les ouvriers ne pouvaient pas être de droite et les bourgeois progressistes ! Cette vision de la représentation est ultra déterministe et résume la diversité sociale aux catégories professionnelles. En second lieu, les participants seront « formés » par des experts afin d’éclairer leur décision. Cette formation semble insidieusement destinée à se substituer au débat politique. De plus, comment les experts seront-ils choisis, par qui, sur quels critères ? Les plateaux télévisées donnent quotidiennement une idée de la fausse diversité et de la fausse objectivité de spécialistes aux idées souvent très conservatrices. La CCC formulera des propositions dont M. Dion précise qu’elles devront peser sur les décideurs, les influencer. Comment admettre un tel pouvoir conféré à 150 personnes (abonnées à un téléphone fixe) prises au hasard ? La sélection de Daniel Cohn-Bendit, révélée par Le point, fait quelque peu douter de ce hasard…

En outre, quelle peut être la légitimité des ces "tirés au sort" ? On veut nous rassurer en confiant au parlement ou au referendum le choix de la décision finale. Mais, outre que la représentativité du parlement est, par principe dans ce schéma, contestée, sera-t-il en situation de remettre en cause les propositions de la CCC présentées comme l’émanation « objective » de citoyens « formés » ? Idem pour le referendum : sera-ce un referendum sous influence ? A l’inverse, si le résultat n’est pas conforme à la CCC, sera-t-il respecté ? Depuis la violation du vote des Français du 29 mai 2005, le doute est permis…

On se prend à penser que les « experts » tels que Cyril Dion ne cherchent qu’à contourner la démocratie pour, comme il le dit lui-même, « prendre les mesures radicales nécessaires pour faire face aux défis actuels ». En bref, les défis auxquels nous sommes confrontés, en particulier en matière climatique, servent de prétexte pour remettre en cause la souveraineté populaire. Pire, ils redéfinissent un « peuple Potemkine » qui aura le bonheur de recevoir le prêche de ces fameux experts.

D’autres « spécialistes » avaient déjà agi dans cette voie en matière économique au nom de la bonne gouvernance. Un pas de plus est ainsi prévu vers une dictature tranquille.

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