Toujours le 29 mai

Toujours le 29 mai

Mardi 26 mai 2020, par Pascal Geiger

Dans le cadre de la célébration du vote des Français le 29 mai 2005, nous avons reçu nombre de commentaires (Voir https://www.pouruneconstituante.fr/spip.php?article1745 ). Le texte ci-dessous développe à sa manière la portée de l’évènement.

15ème anniversaire du NON au Traité constitutionnel européen : un espoir trahi.
En 1998, Dieter Grimm, juriste allemand et ancien juge à la Cour Constitutionnelle fédérale, évoquait l’indétermination politique de la Communauté Européenne : « …, elle n’est pas un Etat puisqu’elle a trop peu d’attributs de souveraineté, mais elle en a trop pour être une organisation internationale.

…, le défaut de pouvoirs qui la différencie d’un Etat est son incapacité à déterminer de façon autonome le fond et la forme de sa propre existence politique, … » - cf. La Cour européenne de justice et les juridictions nationales vues sous l’angle du droit constitutionnel allemand - CAHIERS DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL N° 4 - AVRIL 1998 -.

En 2005, les chefs d’Etat ou de gouvernement souhaitaient corriger cette indéfinition politique, en proposant à leurs concitoyens un projet de traité constitutionnel européen, dont l’ambition était, entre autres, de rationaliser les institutions européennes et de rassembler sous un acte unique l’ensemble des traités européens en proclamant urbi et orbi le principe démocratique de cette nouvelle organisation supranationale, l’Union Européenne.

Le double refus franco-néerlandais mettait heureusement un coup d’arrêt à ce processus de formation d’une union politique.

Battus mais pas défaits, les chefs d’Etat ou de gouvernement de l’UE, sous l’impulsion de la présidence allemande de l’UE, rédigèrent, dans le cadre d’une conférence intergouvernementale (CIG), un projet de traité modificatif - le futur traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007 entre les 27 Etats-membres -.
Il est inutile de revenir sur les modalités de ratification de ce texte par les parlementaires français. Chacun peut mesurer la trahison des représentants du peuple.

Ce traité engageait plusieurs réformes institutionnelles considérées comme essentielles pour l’UE dont celle la dotant d’une personnalité juridique. Seule la Communauté européenne en était, alors, pourvue avec un champ de compétences limité à l’économie et au commerce. De facto, l’attribution de la personnalité morale à l’UE (aux compétences sans cesse élargies) signifiait qu’elle se substituait à celles des Etats-membres et, en conséquence, leur interdisait de se manifester lorsqu’elle s’exprimait (cf. l’accord économique et commercial global (AECG) ou Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA)). Il s’agit là de l’un des fondements du fédéralisme.

Pour autant, ni état fédéral, encore moins confédération, l’UE restait un indéterminé politique. Ne pouvant gagner une souveraineté reconnue, elle dissolvait celle des Etats-membres dans la complexité de son cadre institutionnel et de son processus décisionnel. C’était contre un tel cadre normatif et institutionnel que les Français dirent NON au TCE, le 29 mai 2005. S’ils étaient à nouveau appelés à se prononcer pour ou contre un projet tel que le TCE, ils voteraient contre non à 55,1% comme en 2005 mais à 57% (Cf. sondage IFOP-JDD de mai 2019). Aussi, tant que les citoyens des Etats-membres ne se seront pas exprimés sur leur bien commun, c’est-à-dire les « choses » qu’ils souhaiteraient mettre en commun pour concrétiser l’universalité humaine qui les caractérise, il ne saurait y avoir de souveraineté européenne, et ce quel que soit le cadre pseudo-constitutionnel imposé. Pour l’heure, il importe de renforcer la souveraineté de la Nation en en appelant à l’élection d’une Assemblée constituante.