Multiplication des crises. Sommes-nous encore en démocratie ?

Multiplication des crises. Sommes-nous encore en démocratie ?

Samedi 8 juillet 2023, par Ahlem Girard, Rémy Goubert

Dans un monde en permacrise, il était inévitable d’affronter une crise démocratique. Non pas que ce phénomène soit nouveau, il nous guettait, endormi avec parfois quelques soubresauts. Ces derniers mois ont été le théâtre d’affronts démocratiques pluriels qui ont considérablement érodé la confiance du peuple envers ses institutions.

Certes, nous vivons indéniablement dans un pays plus démocratique que la Corée du Nord mais faut-il s’en contenter ? Nous, jeunes de gauche, sommes convaincus que la réponse à cette énième crise doit être ambitieuse et doit se revendiquer du socialisme démocratique.

C’est revendiquer que la démocratie ne se résume pas au vote, c’est admettre que l’abstention électorale a rendu notre régime incapable de fédérer la population autour de moments communs, d’habitus, abîmant ainsi la bonne santé démocratique de notre République qui repose précisément sur cette capacité. Par ailleurs, l’abstention ne choque plus et s’est fondue dans la masse informationnelle inhérente à chaque élection laissant de côté l’alerte démocratique qu’elle doit représenter. C’est une forme de léthargie démocratique dans laquelle nous nous trouvons.

Alors, nous pensons que la démocratie ne peut plus être matérialisée par la seule délégation du pouvoir à un groupe d’individus pour 5 ans, sans possibilité pour la population de demander des comptes, de juger et de délibérer. Ce n’est pour autant pas le référendum permanent qui résoudra le problème car il faut reconnaître à nos problématiques des subtilités ne pouvant pas toujours être résolues de façon binaire. D’autant plus dans le système de la Ve République où ces outils peuvent être utilisés contre le/la Président.e en place en dépit de la question posée. Par ailleurs, un bon référendum – car son utilisation est parfois utile – nécessite une bonne information de toutes et tous et donc une campagne exercée dans de bonnes conditions et sans fausses informations comme nous avons pu le constater durant le Brexit. C’est aussi par l’innovation démocratique que nous permettrons à nos concitoyens de retrouver le chemin des urnes.

Alors, qu’est-ce que la démocratie ? C’est un système dans lequel la majorité prend les décisions quel que soit l’échelon. C’est un système dans lequel la discussion est primordiale, le dialogue impératif et la délibération cruciale. Ainsi, lorsqu’une réforme n’est pas débattue par la population, ni tranchée, nous ne sommes pas en démocratie. Que dire alors lorsqu’une réforme n’est pas votée par les représentants du peuple ?

Nous croyons en la démocratie participative et sociale. Nous rappelons qu’il convient de ne pas se limiter à la question institutionnelle et nous pointons du doigt l’importance de la démocratie dans l’entreprise. Il est insupportable, pour nous socialistes, de voir la démocratie s’arrêter aux portes de l’entreprise alors que nous y passons la majorité de notre temps. Tous les cadres doivent être démocratisés. C’est la raison pour laquelle nous défendons, dans l’héritage du camarade Auroux et de ses lois, la mise en œuvre partout de l’autogestion et a minima de la cogestion.
Quant à l’affaire institutionnelle, nous serions déjà moins vindicatifs à l’égard de ce régime s’il permettait une juste représentation des diversités sociales dans les lieux de pouvoir. Il n’est pas cohérent de vouloir agir pour le plus grand nombre quand ce nombre n’a pas accès aux responsabilités et se voit dicter les règles du jeu par une minorité sociale déjà radicalement favorisée.

Cette crise démocratique qui explose avec vigueur face à nous, après l’éclatement de la Guerre en Ukraine, la montée en puissance des crises liées au changement climatique, la montée du fascisme dans le monde et notamment en Europe, il faut savoir mais surtout vouloir la résoudre car elle ne fera que renforcer les différents événements que nous venons de citer en favorisant l’augmentation de la défiance vis à vis des institutions, entreprises et médias laissant la part belle à l’implantation de discours complotistes issus notamment des sphères d’extrême droite.

Alors, changeons les règles du jeu, implantons le socialisme démocratique.