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Comment utiliser la crise du système à usage personnel
Mardi 10 décembre 2024, par
« Les citoyens qui se nomment des représentants renoncent et doivent renoncer à faire eux-mêmes la loi ; ils n’ont pas de volonté particulière à imposer. S’ils dictaient des volontés, la France ne serait plus cet Etat représentatif ; ce serait un Etat démocratique ».
Emmanuel-Joseph Sieyès
Pourquoi rappeler cette phrase ? Parce que c’est devenu une nouvelle mode pour certains de ceux qui veulent critiquer la démocratie représentative de se retrancher derrière une pensée d’Emmanuel-Joseph Sieyès qui les arrange. Des personnalités telles que Dominique Rousseau ou Etienne Chouard l’évoquent à longueur de conférences pour attaquer la représentation politique et même le suffrage universel.
Mais pourquoi diable a-t-on ressorti ce nom d’un des acteurs de la Révolution et de l’empire jusqu’alors surtout connu pour son hostilité au suffrage universel ? Sieyès était un partisan du suffrage censitaire, c’est-à-dire réservé aux plus riches et fut un des artisans principaux du coup d’état du 18 Brumaire qui conduisit à supprimer le République et à créer l’empire napoléonien. On pourrait donc naïvement penser que Sieyès était avant tout hostile à une représentation démocratique. Pourquoi alors l’utiliser pour critiquer toute représentation ? Certes, il était un représentant hostile à toute démocratie, mais était-ce le cas de tous les représentants du Tiers-Etat, de tous les membres de la convention élue en 1792 après le renversement de monarchie ? Était-ce le cas de Camille Desmoulins, de Robespierre ou de Danton ?
La question de la démocratie agite les esprits tout au long de la Révolution. Elle est présente dans l’élaboration de la Constitution de 1793. Au-delà des soubresauts, elle est présente jusqu’à nos jours. S’il y a des représentants, la question reste, depuis lors, de leur contrôle par les électeurs. D’où les questions qui émergent récemment : RIC, mandats impératifs, contrôle des élus. Si la situation impose de travailler sur ces concepts, elle ne donne absolument pas à des experts autodésignés le droit de s’attaquer au suffrage universel pour leur donner une place de représentants -eh oui- issus du hasard et hors de tout contrôle réel par les citoyens.