À propos de l’Espagne et de l’Europe
Vendredi 20 avril 2012, par
Voilà un peu plus de cent jours que Mariano Rajoy a été investi, après une victoire confortable aux élections législatives générales, en qualité de Président du Gouvernement Espagnol.
Dès son investiture, ce gouvernement conservateur a engagé plusieurs réformes dont celles concernant le travail, la finance et la stabilité budgétaire. Il faut dire que l’accession au pouvoir de ce Gouvernement comme la mise en œuvre de sa politique lui ont été grandement facilitées par le Gouvernement précédent du socialiste José Luis Zapatero.
Ce dernier a en effet constitutionnalisé la fameuse règle d’or afin de satisfaire aux exigences et pressions de l’ Europe de Bruxelles. Cette règle d’or avait été exigée du Gouvernement Zapatero, afin de faire face à la crise de l’immobilier, à la crise financière, pour contenir les déficits ou bien encore défendre l’euro, et Zapatero n’avait pas su résister aux demandes de l’oligarchie de Bruxelles.
C’est ainsi que le gouvernement socialiste a acté de nombreuses mesures impopulaires et en particulier, sans que cette liste soit limitative, les suivantes :
La suspension de l’indexation des pensions pour l’exercice 2011, exception pour les pensions à minima et les pensions non contributives,
La réduction des salaires des employés du secteur public de 5% en moyenne à compter du 1er juin de2010 et ce jusqu’en décembre 2019,
La suppression de la déduction fiscale pratiquée sur l’impôt sur le revenu pour chaque naissance ou adoption,
La suppression de la prestation économique de paiement unique de la sécurité sociale pour une naissance ou une adoption d’enfant,
Et bien d’autres mesures antisociales encore.
Mais la rigueur, comme en Grèce, s’est traduite par une morosité ambiante qui a engendré une contraction de la demande, l’augmentation du chômage, éléments qui ont entraîné une instabilité sociale, auxquels s’est ajouté un resserrement du crédit qui a dissuadé les investisseurs les mieux intentionnés.
Au regard d’une telle politique et en l’absence de tout résultat concret, il était facile pour la droite de cueillir le pouvoir lors des élections générales tant le POSE avait mécontenté la majorité des espagnols.
Aujourd’hui, alors que les promesses électorales n’engagent que ceux qui les reçoivent, les réalités sont devant le gouvernement Rajoy qui a fait la promesse du retour de l’emploi. En clair « le travaillez plus pour gagner plus ».
Le niveau de la dette espagnole est au plus haut depuis la création de la statistique dans ce pays en 1995. Il est supérieur à la limite fixée par le Pacte de stabilité de l’UE (60%), mais demeure néanmoins 20 points en-dessous de la moyenne en zone euro (87,4% au troisième trimestre 2011).
Fin décembre, elle s’élevait à 734,961 milliards d’euros soit 68,5% du PIB, un bond de plus de deux points en seulement trois mois (66% au troisième trimestre).
Le gouvernement socialiste prévoyait pour fin 2011 une dette à 67,2% du PIB, avec pour objectif de la maintenir sous les 70% jusqu’en 2014. L’institut de statistiques européennes Eurostat tablait lui sur 69,6% en 2011, 73,8% en 2012 et 78% en 2013.
Mais la dette publique espagnole, en proportion du PIB, est en hausse continue depuis le premier trimestre 2008, où elle atteignait 35,8%, après plus d’une décennie de baisse, alors que le pays était en forte croissance avec des comptes publics excédentaires.
La situation des 17 régions autonomes est également préoccupante : fin 2011, leur dette cumulée atteignait 140,1 milliards d’euros, soit 13,1% du PIB du pays (contre 11,4% un an plus tôt), un record historique selon les chiffres de la Banque d’Espagne, tandis que celle des municipalités recule légèrement sur un an, à 35,4 milliards (3,3% du PIB).
Le fort degré d’autonomie des régions espagnoles ajoute à "l’inquiétude des marchés", qui craignent que leur endettement ne compromette l’objectif du gouvernement de réduire son déficit : ce dernier, qui a déjà dépassé de plus de deux points la limite fixée pour 2011 (8,51% du PIB contre 6% prévus), devra être ramené à 5,3% en 2012, puis 3% en 2013.
L’administration centrale voit elle aussi sa situation financière empirer, avec une dette publique de 52,1% du PIB fin 2011, contre 46,4% un an plus tôt.
Le Gouvernement Rajoy a demandé à tous les Ministères de réduire leur budget de 17%. Cela va se traduire par de nouvelles coupes dans l’éducation, la santé, les salaires, les pensions et retraites et autres revenus des Espagnols qui n’avaient pas besoin de cela.
Si l’inquiétude grandit à nouveau en Europe au sujet de la situation budgétaire et économique de l’Espagne elle est encore plus palpable en Espagne ou la population est exaspérée et montre son mécontentement. Deux élections régionales se sont déroulées au mois de mars, en Andalousie et aux Asturies, et ont indiqué un recul des partis traditionnels au profit de la gauche uni (Izquierda Unita). Par ailleurs une manifestation a entrainé le 29 mars des centaines de milliers d’Espagnols dans la rue. Une nouvelle manifestation est prévue début mai et des manifestations spontanées ont lieu tous les jours contre les expulsions d’Espagnols de leur logement ou encore contre les abus bancaires.
L’Europe qui devait apparaître comme une grande espérance pour les peuples récolte aujourd’hui, de par son fonctionnement, un rejet massif de populations toujours plus nombreuses qui voient dans cette institution un instrument uniquement au service de la finance, un outil utile à la mise en œuvre de toutes les mesures antisociales, et la cause de bien des maux infligés aux populations.
L’Europe sans les peuples est condamnée à l’échec.