La République des soumis

La République des soumis

Mercredi 3 juillet 2013, par Association pour une Constituante

La solidarité gouvernementale est un principe nécessaire pour le bon fonctionnement des institutions. Encore faut-il, ici comme en d’autres domaines, et surtout après le limogeage de Delphine Batho, s’entendre sur le sens des mots.

Être solidaire, c’est être conscient et responsable. Ce n’est pas être soumis sans esprit critique à des directives sur lesquelles on n’a aucune prise.

La solidarité gouvernementale doit se construire au travers d’un débat entre les membres du gouvernement, débat qui mène à un accord. C’est alors qu’un ministre reste ou pas au gouvernement, parce qu’il a pu choisir.

Telle est la règle républicaine. Mais tel n’est pas le fonctionnement actuel des institutions. Le cadre général dans lequel doit s’insérer le budget national est défini par Bruxelles, les modalités d’application par Bercy. Le ministre n’a alors plus qu’à s’incliner, en bon vassal du présidentialisme.

Ainsi, ce qu’on appelle solidarité n’est qu’un appel à la discipline la plus primitive. Les ministres ne sont que les fonctionnaires du système. Le gouvernement, dépouillé de toute souveraineté quant aux décisions économiques, exerce par contre sa souveraineté sur les élus du peuple. Ne cherchant aucunement à les consulter sérieusement sur ces questions, il se borne, lui aussi, à exiger leur « solidarité ». Comment s’étonner alors que les citoyens ne se sentent plus représentés ?

1 Message

  • La militarisation de la vie publique

    Le 3 juillet 2013 à 20:17 par Louis SAISI

    Cette analyse traduit excellemment, et de manière très forte, la situation politique caractérisant la dérive présidentialiste et même franchement autoritaire des institutions de notre pays où sévit un caporalisme consternant et affligeant ayant gagné tous les rouages de l’Etat... Sans parler du malaise républicain que l’on ne peut que ressentir devant une telle dérive. Et je ne dis pas dérive "présidentielle" à bon escient car notre Président de la République actuel a plus de pouvoirs que tous les Présidents des régimes présidentiels existant partout dans le monde (Etats-Unis et Amérique latine).
    Les Ministres ne sont que des petits soldats déplaçables (jeu de chaises musicales entre BRICQ et BATHO dans un premier temps) et limogeables (BATHO) au gré de l’humeur présidentielle car ils sont davantage responsables devant le Chef de l’Etat que devant la représentation nationale du pays dont le Parlement devrait être normalement l’émanation...
    Rappelons que la solidarité collégiale des membres du gouvernement est le fruit de l’évolution de systèmes au départ monarchiques vers des systèmes parlementaires dans lesquels le Chef de l’Etat s’efface au profit d’un gouvernement de nature hybride responsable devant le pouvoir législatif (Parlement). Jadis, la solidarité gouvernementale était une solidarité des membres du Gouvernement devant le Parlement afin de permettre aux membres du gouvernement d’être liés entre eux pour mieux faire face aux interpellations du Parlement et à ses diverses modalités de contrôle. L’Exécutif gouvernemental était alors investi collégialement de la confiance de la représentation nationale. Il était dès lors normal que par rapport à ce pacte initial les membres du gouvernement restent soudés entre eux pour appliquer un programme politique débattu devant la représentation nationale. Mais ce risque destiné à équilibrer les deux pouvoirs n’existe plus. Le phénomène majoritaire résultant d’une majorité godillots soumise au pouvoir élyséen ne fait plus courir ce risque au gouvernement ni encore moins à aucun de ses ministres : l’élection de députés, postérieure à celle du Président, n’est jamais que le deuxième acte de la sacralisation du pouvoir présidentiel et de son Parti.
    Aujourd’hui, en fait de programme politique devant le Parlement, il n’y en a plus car le seul "programme politique" est celui du Président avec ses « engagements » pris devant le pays lors de son élection. Mais pas plus qu’hier, ce programme n’existe plus... car chacun sait que ce programme électoral est à géomètrie variable : quoi de commun entre le discours du BOURGET du candidat aujourd’hui président Hollande et sa politique d’austérité ? Quoi de commun entre le slogan "le changement, c’est maintenant" et la reprise, par le Président et "son" gouvernement, de la ligne politique Sarkozy-Fillon ?
    Normalement, en démocratie, là où est le pouvoir, là est la responsabilité.
    Ainsi, en régime parlementaire, le Gouvernement qui a le pouvoir exécutif et dirige et conduit la politique de la nation est responsable devant la représentation nationale qui peut le sanctionner par le vote de défiance que constitue la motion de censure. L’équilibre des pouvoirs est en même temps rétabli en faveur de l’Exécutif par la possibilité d’en appeler au peuple par la dissolution de la chambre ayant voté la censure par le recours à de nouvelles élections pour arbitrer le conflit entre l’Exécutif et le Législatif.
    Mais aujourd’hui, l’organe qui a le plus de pouvoirs - le Président de la République - n’est responsable devant personne. Il faut attendre la fin de son mandat pour qu’il soit éventuellement sanctionné, ce qui suppose qu’il ait au moins en face de lui un adversaire présentant une autre alternative...
    Mais de plus en plus les challengers du Président en place ne présentent que des alternances à l’américaine avec un simple changement de personnel politique, même lorsqu’ils prétendent incarner une autre politique ... car la politique de l’Union européenne - qui, elle, est continue - oblige et contraint nos gouvernants, avant tout zélés serviteurs de ses dogmes, à se déterminer conformément aux grands intérêts économiques et financiers privés, et ce, quels que soient les Présidents qui ne font que passer comme des ombres chinoises furtives : Giscard d’Estaing, Mitterrand, Chirac, Sarkozy, Hollande...
    Mais tant de pouvoirs présidentiels pour faire quoi au bout du compte ? Exercer simplement ces pouvoirs sur les hommes, comme le limogeage d’une Ministre rebelle ?
    Et les "Verts" dans tout ça ? Ils ne sont toujours pas "mûrs" pour quitter le gouvernement, mais quoi d’étonnant ? Leur réunion d’hier était plutôt dans le style grand-guignolesque "arrêtez-nous ou on fait un malheur"... Pourtant les sujets de dissension ne manquent pas : politique générale d’austérité ; ratification du pacte budgétaire européen en octobre 2012 ; loi du 14 juin 2013 relative la sécurisation de l’emploi, qui, coup de bluff énorme, ne sécurise rien mais au contraire précarise tout…
    « On ne va pas quitter le gouvernement tous les mois » se justifie le Sénateur Jean-Vincent Placé, c’est vrai qu’aujourd’hui, avec l’amputation du budget de l’écologie de 7% (mais rigueur oblige…), ils sont allés une fois de plus à Canossa...
    Louis SAISI

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Lien hypertexte

(Si votre message se réfère à un article publié sur le Web, ou à une page fournissant plus d’informations, vous pouvez indiquer ci-après le titre de la page et son adresse.)