Union européenne : le triomphe de l’ambiguïté
Lundi 28 juillet 2014, par
On pourrait considérer l’élection du luxembourgeois Jean-Claude Junker à la présidence de la Commission européenne comme un évènement anodin, une large majorité d’États-membres y étant favorables.
En fait, la chose est plus compliquée, une nouvelle règle demandant que le Parlement européen avalise la proposition des gouvernements. Ce principe tend à imposer l’idée que les structures fédérales -en l’occurrence le « Parlement européen »- sont démocratiques, donc légitimes, alors même que les citoyens des États-membres ont massivement refusé de participer aux « élections européennes ». En fait, cette pseudo évolution démocratique, appuyée par de grands sons de trompe médiatiques, est un coup de force contre la souveraineté des peuples qui n’ont jamais été consultés sur le principe même de leur propre dilution dans un espace européen incohérent autant qu’ambigu. Peu importe aux dirigeants que les citoyens refusent majoritairement de légitimer ces coups de force ou même qu’ils votent contre. Le fameux « Parlement » européen, censé représenté un peuple européen qui n’existe que sur le papier, demandera qu’on n’en tienne pas compte comme il l’avait fait après le Non des français et des néerlandais au Traité Constitutionnel européen en 2005. (Voir http://www.pouruneconstituante.fr/spip.php?article863 )
Fort étonnante, du moins en apparence, a été l’attitude de parlementaires représentant des partis qui se disent de gauche, voire d’extrême gauche (les grecs) ou écologistes critiques de la mondialisation et qui ont voté pour l’extrême libéral qu’est Jean-Claude Juncker, président très orthodoxe de l’eurogroupe pendant 10 ans. L’argument est assez inattendu : considérant que le groupe le plus important est le groupe de Monsieur Juncker (Parti populaire européen, c’est-à-dire la droite libérale), ils déclarent soutenir le principe démocratique en votant pour lui, un peu comme si l’UMP votait pour les candidats du PS aux postes de responsabilités à l’Assemblée nationale au prétexte de la majorité détenue par ce Parti. Ils opposent ainsi le consensus des partis à l’illégitimité des élus. L’absurdité de ce comportement illustre la manière dont la construction européenne détruit la vie politique et sape toute possibilité de représentation réelle et juste des électeurs.
En définitive, une très grande coalition a affirmé, par ses votes, que la vraie question était, avant tout autre débat, d’imposer la prééminence de structures fédérales européennes, imbibées d’un libéralisme congénital et par ailleurs soumises à des intérêts atlantistes plus larges. Le traité transatlantique, s’il était adopté, permettrait en effet d’éliminer les derniers restes de souveraineté des peuples qui composent cet espace en créant au profit des multinationales des structures qui écrasent les États et leurs Parlements.
Une telle attitude est antidémocratique puisqu’elle ne tient aucun compte de la volonté des citoyens ; elle est dangereuse car elle crée un système sans soutien populaire alors même que s’accumulent les défis. Elle entraîne la France dans des conflits sur lesquels elle n’a aucune maitrise comme le montrent l’attitude vis-à-vis de la Russie ou le détournement par la France de l’avion du Président bolivien Evo Morales en août 2013 au prétexte (d’ailleurs faux) qu’il transportait Edward Snowden
( Voir http://www.pouruneconstituante.fr/spip.php?article740 ).
La France est-elle aujourd’hui autre chose qu’un pion soumis à des intérêts qu’elle ne comprend même pas ? Alors, il ne faudra pas s’étonner, demain, de voir monter l’influence des thèses et des partis d’extrême droite.